Être prof : enseigner l’histoire suisse

A Noël, nous aurons enfin fini le premier sujet d’histoire en classe de 9e (élèves de 12 ans environ) : l’histoire suisse. Il aura fallu 585 minutes (13×45 minutes de cours) pour couvrir partiellement le sujet. Les deux dernières périodes de 45 minutes étaient réservées aux deux tests. Eh oui, il faut 3-4 notes sur l’année et nous n’avons que 45 minutes par semaine…

Certains me diront que c’est beaucoup, d’autres que c’est peu. Pour moi, c’était interminable ! Et le pire, c’est que dans les faits, nous n’avons abordé l’histoire suisse seulement jusqu’en 1352… Nous nous sommes arrêtés aux huit premiers cantons sur les vingt-six !

Vous n’imaginez même pas la motivation débordante de mes élèves… Parler des Waldstätten (Uri, Schwyz et Unterwald, les trois premiers cantons réunis), du col du Saint Gothard, de la domination Habsbourg, du pacte de 1291 ou encore de la Suisse au XIVe siècle, cela ne les passionne pas vraiment. Heureusement, il y a Guillaume Tell et mes singeries pour leur faire passer la pilule !

Guillaume Tell - Mix et Remix

Guillaume Tell – Mix et Remix

Mais le plus révoltant dans tout ceci, ce n’est finalement pas d’étudier l’histoire de notre beau pays seulement jusqu’au XIVe siècle. Non, c’est surtout de savoir que ce n’est QUE le premier sujet et que nous aurons déjà fait la moitié de l’année…

Vous voulez savoir ce qui est prévu ensuite dans le programme de 9e ? Vous n’allez pas me croire…

La Confédération suisse des origines au XVIIIe siècle (déjà là, j’ai un problème…), les grandes découvertes et les conquêtes, l’humanisme, la renaissance des arts et des idées, ainsi que les réformes religieuses. Rien que ça… Sérieusement ? Vous pensez, que je peux faire tout cela en 39 semaines avec seulement une période par semaine ? Vous, mes chers politiciens, l’avez-vous déjà essayé ? Et si oui, qu’ont retenu vos élèves ? Certainement le stricte minimum et ce n’est même pas sûr qu’ils aient bien compris le protestantisme, le catholicisme, les causes et conséquences de la Réforme, l’impact de l’humanisme et de la Renaissance. J’imagine qu’ils ont seulement retenu quelques bribes de cette histoire si riche.

Je ne sais pas dans quel monde vous vivez, mais dans le mien, les élèves et les professeurs devraient pouvoir prendre un peu de plaisir…

Bon, maintenant que j’ai fait mon petit coup de gueule, je peux peut-être vous rafraîchir un peu la mémoire.

L’histoire suisse pour les nuls, enfin, pour ceux qui ont un peu oublié leurs bases :

  • Une date à retenir : 1291 (pacte entre les Waldstätten)
Mix et Remix

Mix et Remix

  • Un peu de géographie : tout se passe, au départ, autour du Lac des Quatre-Cantons
  • Un personnage connu : Guillaume Tell
  • La première bataille pour l’indépendance : la bataille de Morgarten. Untitled1 C’est d’ailleurs l’événement qui plaît le plus aux élèves. Voici l’extrait qu’ils adorent. Vous comprendrez vite pourquoi. :

 Jean de Winterthur, Chronique, 1340-1347.
« Le 15 novembre 1315, le duc Léopold cherche à pénétrer dans le pays entre une montagne et un lac nommé Aegeri. Les Schwyzois savaient d’avance […] que c’était de ce côté qu’ils seraient attaqués … Aussi, sortant courageusement de leurs refuges, se précipitèrent-ils sur eux et les attaquent-ils, comme des poissons enfermés dans le filet ; ils les massacrent sans résistance. Ils avaient, en effet, suivant leur usage, chaussé certains instruments qui leur permettaient de marcher sur les pentes les plus abruptes … tandis que les ennemis et leurs chevaux n’étaient absolument pas en état de mettre un pied devant l’autre. Les Schwyzois étaient de plus armés d’instruments meurtriers terribles, appelés hallebardes dans le langage du pays, avec lesquels ils fendaient en deux et mettaient en pièces, comme avec des ciseaux, les ennemis les plus fortement armés. Ce ne fut donc pas une bataille, mais bien, pour ainsi dire, une boucherie des gens de Léopold par ces montagnards, comme un troupeau mené à l’abattoir. Les gens de Schwyz n’épargnent personne et ne cherchent pas à faire des prisonniers ; ils massacrent tout sans distinction. Ceux qui ne sont pas tués par eux se noient dans le lac, par lequel ils espéraient échapper à leurs mains, croyant pouvoir le traverser à la nage… »

  • Un fait : à chaque affrontement (Morgarten, Sempach, Näfels) avec les Habsbourg, les Confédérés ont gagné. En un siècle, la Confédération passe de 3 à 8 cantons (1388).

Voilà, vous savez presque tout. Je plaisante, mais vous avez en quelques points les éléments les plus importants du début de notre Suisse actuelle. Je pourrai peut-être terminer en précisant que c’est seulement en 1848 que sont enfin réunis les 26 cantons de la Confédération helvétique. Je vous passe les détails de cette évolution.

Un coup de gueule qui se termine avec un peu de culture, c’est pas mal, non ? 

4 Comments

  • Aileza

    1 décembre 2015 at 8 h 57 min

    Je crois qu’il n’existe pas un seul programme pédagogique intelligent à travers le monde !
    Sinon merci pour ce petit résumé pour les nuls. Nous autres français avons déjà fort à faire avec notre histoire et du coup nous ne connaissons pas grand chose à celles de nos voisins 🙂

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    • Entre vous et moi

      1 décembre 2015 at 16 h 26 min

      C’est clair, le système de l’éducation n’est pas toujours au top… Mais dans quoi est-ce que je me suis embarquée ? 🙂

      Et de rien pour le petit résumé. J’ai bien pensé que mes amis français n’auraient pas ces petites informations.

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  • Cavali'Erre

    1 décembre 2015 at 23 h 12 min

    Le problème avec ton résumé, c’est qu’il s’arrête il y a « quelques » années, je crois que j’ai encore beaucoup à apprendre sur mon nouveau pays d’accueil!
    Mais les programmes scolaires trop chargés, ça, c’est loin d’être une spécificité suisse! Courage!

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